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ARNODIN Ferdinand
Le rénovateur de la technique des ponts suspendus et inventeur des pont transbordeurs.
Ferdinand Arnodin est né le 9 octobre 1845 à Sainte-Foy-lès-Lyon.
Fils d’un chef de travaux de l’entreprise Seguin qui est installé à Châteauneuf-sur-Loire, il suit les cours de l’école professionnelle d’Orléans, puis travaille comme charpentier, tailleur de pierres et mécanicien dans diverses entreprises, et suit les cours du soir du Conservatoire (alors Impérial) des Arts et Métiers.
En 1866, après la mort de son père, Ferdinand Arnodin est embauché comme inspecteur des ponts par la Société générale des ponts à péage, nouvelle société des frères Seguin. Son premier chantier est le Pont suspendu de Kermelo qui est concédé en 1834 à la « Compagnie Seguin frères » (1838) et dont la construction s’achève en 1838. L’anecdote raconte qu’il y rencontre sa future épouse, Charlotte Kérihuel, qui a pour domicile la maison située à l’entrée du pont du côté de la commune de Plœmeur. Ils se marient le 15 septembre 1868 à Ploemeur. Leur fille Aline Marie Charlotte Arnodin se mariera le 22 octobre 1900 à Châteauneuf-sur-Loire, avec Gaston Leinkugel – Le Cocq qui le secondera pour la construction des ponts.
Si la construction des ponts suspendus s’était arrêtée en France à la suite de l’effondrement du pont de la Basse-Chaînes à Angers qui provoqua en 1850 la mort de 220 soldats du 11e régiment d’infanterie, puis de l’effondrement du pont de La Roche-Bernard en 1852, c’est grâce à l’action de Ferdinand Arnodin que la construction des ponts suspendus va être relancée en améliorant leur stabilité vis-à-vis des actions dynamiques. Pour cela, il introduit deux innovations majeures que sont l’augmentation de la rigidité des poutres latérales du tablier et l’invention des câbles toronnés à torsions alternatives (à la place des câbles à fils parallèles qui resteront le principe d’emploi aux Etats-Unis). On lui doit aussi les suspentes en tiges d’acier à extrémités forgées, les massifs d’ancrage visitables, la généralisation de l’ancrages des câbles par culots de fonte, l’utilisation du béton armé comme support des chaussées, l’utilisation de haubans pour soutenir les tabliers suspendus à proximité des pylônes, et l’idée de l’amovibilité de tous les éléments d’un pont suspendu.
Le premier pont suspendu moderne à Saint-Ilpize en Haute-Loire (© : MOSSOT – Sous licence Creative Commons)
En 1869, au pont suspendu d’Ancenis construit en 1837-1839 par les Seguin, il commence à appliquer le principe du remplacement des câbles, et remplace des amarres fixes de câbles par des pièces en fonte appuyées sur la maçonnerie.
En 1872, il fonde à Châteauneuf-sur-Loire son entreprise, où il installe une machine spécifique pour toronner les câbles.
Après avoir rénové en 1875, la passerelle Saint-Symphorien, à Tours, construite par les Frères Seguin en 1845-1847, c’est en 1879 qu’il construit à Saint-Ilpize en Haute-Loire le premier pont suspendu moderne. Ce pont a une travée centrale de 68 m, et deux travées de rive de 15m. Le tablier est supporté par deux câbles de tracé parabolique et par huit haubans de part et d’autre des pylônes sur une longueur de 15m. Les plans dans lesquels sont compris les haubans et la suspension présentent une inclinaison de 10 % de façon a diminuer les oscillations. Les câbles et haubans sont fixés sur des plaques d’assemblage en fonte dans lesquelles les extrémités des câbles sont épanouies en cône, selon le système inventé par Roebling.
Il va ensuite concevoir, construire et restaurer de nombreux ponts suspendus comme :
- Le pont de Chilhac sur l‘Allier, Haute-Loire (1883, ingénieur Heurtault)
- le pont de Tonnay-Charente sur la Charente (construit par Lazare Joseph Aimé Dor 1842) en Charente-Maritime, tablier reconstruit par Arnodin en 1884
- le pont de Lamothe sur l’Allier, Haute-Loire, édifié entre 1882 et 1887, il n’en reste plus que les pylônes après la dépose du tablier et des câbles en 1977
- le pont de l’Abîme, entre Gruffy et Cusy, sur le Chéran (Haute-Savoie) (1887)
- le Pont de Saint-Léger (1889), sur la Roudoule à la Croix-sur-Roudoule, Alpes-Maritimes
- le pont de La Croix Saint Ouen, dans l’Oise (1892), détruit en 39-45, reconstruit en 1949
- le pont de la Rivière de l’Est, à La Réunion (1894), restauré en 2022
- le pont de Bonpas sur la Durance (1894), à Caumont-sur-Durance Vaucluse, 1894, pont de 520 m de long à quatre travées, détruit en 1944 lors de la retraite allemande
- le pont d’Aramon sur le Rhône (1900) ; il détient alors le record de France du pont suspendu le plus long avec une travée centrale de 274 m de long et deux travées de rive de 45 m (pont aujourd’hui disparu).
- le pont de Bonny-sur-Loire dans le Loiret (1899-1902)
- le pont du Bonhomme sur le Blavet à Lorient (1904) reliant les communes de Lanester et Kervignac, dans le Morbihan. Aujourd’hui le tablier est détruit, seules restent les piles
- le pont suspendu Anosizato à Antananarivo (Madagascar), 1909, 90m (détruit)
- le pont de Groslée sur le Rhône, Ain (1912)
- Le pont de Sidi M’Cid, à Constantine, Algérie (1908-1912), 168 m de long, 175 m au-dessus du Rhummel
- le pont de Bourret sur la Garonne (Ingénieur Gisclard) (1913)
- le pont des Andelys (1914) sur la Seine, dans l’Eure, détruit, reconstruit après 1944
- la passerelle Mellah-Slimane, à Constantine, Algérie ; La passerelle Mellah-Slimane, anciennement passerelle Perrégaux (1917 – 1925).
Sa société va également construire des ponts ferroviaires à câbles comme le pont de Cassagne (pont Gisclard) (1910), entre la halte de Sauto et la gare de Planès sur la ligne du train jaune qui va de Villefranche-de-Conflent à Latour-de-Carol, et le Viaduc des Rochers Noirs, à Lapleau, pont suspendu de type Gisclard, construit pour les tramways de la Corrèze en 1913.
Mais Ferdinand Arnodin est également célèbre en tant que le co-inventeur et constructeur des ponts à transbordeur. Ils ont tous disparu en France, à l’exception du pont du Martrou sur la Charente près de Rochefort, qui vient d’être rénové. Il dépose un brevet le 5 novembre 1887 « pour un système de pont à transbordeur pour grands débouchés servant à la traverse des voies maritimes ». Après avoir aidé Palacio à construire le pont de Portugalete (ou pont de Biscaye) à Bilbao (1890-1893), Il construit les ponts transbordeurs de Bizerte (1896-1898), Rouen (1898), Martrou (1898), Nantes et Newport en Grande-Bretagne (1903), Marseille (1905) et Brest (1907 – reconstruction du pont démonté à Bizerte). Tous ces pont furent exploités par la Société Arnodin, sauf Portugalete et Rouen concédés à d’autres sociétés.
Il meurt le 14 avril 1924 à Châteauneuf-sur-Loire.
Pour en savoir plus :
- Sur Wikipédia : Ferdinand Anodin.
- Ferdinand Arnodin, Notes sur les ponts suspendus. Application du système de la suspension aux ponts de grande ouverture pour voies ferrées, p. 127-140, Annales des ponts et chaussées, 1905, 1er trimestre.
- Brevet de Pont transbordeur de Ferdinand Arnodin : n° 186773 en date du 5 novembre 1887. Description des Machines et Procédés pour lesquels des brevets d’ïnventions ont été pris (tome 65, page 14, Imprimerie Nationale, 1891).
- Bernard Marrey, Les ponts modernes 18e et 19e siècles. Editions Picard, 1990.