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BOUSSIRON Simon
Un grand entrepreneur, pionnier de l’emploi du béton armé en France.
Simon Boussiron est né le 10 avril 1873 à Perpignan. Ingénieur diplômé de l’Ecole des Arts et Métiers d’Aix-en-Provence (1891), il intègre le bureau d’études des ateliers de construction de Levallois-Perret, anciens établissements Eiffel, dirigés par Maurice Koechlin, puis en 1898 entre à la Société pour Travaux de Béton Armé.
En 1899 il crée, avec un autre ingénieur des arts et métiers Antoine Garric, une entreprise de construction appelée Simon & Garric, puis nommée Boussiron et Garric en 1901. C’est cette dernière qui construit notamment le pont de la rue Valette à Perpignan, des planchers en béton armé pour la caserne Niel à Toulouse, des planchers de 15 à 20 m de portée pour le restaurant des Congrès de l’Exposition universelle de 1900.
L’entreprise construit aussi la voûte en voile mince à trois articulation au-dessus du canal Saint-Martin à Paris en 1906 (27,60 m de portée et 243 m de longueur), année où cette société prend le nom de Boussiron, après le retrait de Garric.
Il écrit en 1899 deux ouvrages donnant les bases de calcul du béton armé. En 1906 il dépose un brevet pour « l’articulation des arcs en béton ou en maçonnerie « , brevet qui sera suivi par la rédaction de 31 autres brevets. Son entreprise se spécialise dans les ouvrages en voûtes minces, comme des halles de gares (Bercy-Arrivages 1910), des dépôts ferroviaires (Batignolles 1911, La Garenne-Bezons 1913, Roanne et Nevers pendant la guerre 14-18, et des hangars pour avions (Le Bourget 1924, Bron et Nancy 1925, Bizerte 1934, Marignane 1928, etc.), pour lesquels il montre un esprit d’innovation remarquable (voiles de 8 cm d’épaisseur et 12 m de portée pour la gare de Bercy à Paris en 1910). Pendant la guerre de 1914-1918, il construit des usines, des ateliers, un arsenal, une poudrerie.
Quelques très beaux ouvrages qu’il a construits sont toujours en service : le pont sur le Tech de 40 m de portée à Amélie-les-Bains (1909), le pont de Sapiac à Montauban (1911) avec deux arches de 53 et 56 m. En 1923, il engage au sein de son bureau d’études l’ingénieur Nicolas Esquillan, qui deviendra directeur technique de l’entreprise. Il construit de nombreux ponts en Algérie et au Maroc, notamment le viaduc de l’Oued Habra à Mohammadia (Algérie, 1930, portée 42m), le pont en courbe sur l’Oued Korifla (Maroc, 1931, portée 70 m), ainsi que le pont ferroviaire et pont pour canalisations sur l’oued Bouregreg, entre Rabat et Salé (Maroc, 1954-1957).
D’autres ponts remarquables construits par l’entreprise ont été détruits pendant la guerre en 1940 ou 1944 : le pont de Port-d’Agrès sur le Lot (construit en 1925 par Boussiron, détruit en 1944 par la Résistance, puis reconstruit par Boussiron en 1948), le pont de La Coudette-Peyrehorade sur le Gave de Pau (Bow-string à suspentes inclinées de portée 111 m, 1938-1943, record mondial des ponts route en bow-string en béton armé), le pont-route de Conflans-Fin-d’Oise (construit en 1928 par Boussiron, détruit pendant la guerre en 1940, puis reconstruit par Boussiron entre 1947 et 1950, encore appelé Pont Boussiron, pont en arc avec tablier supérieur de 101 m de portée),
et un grand pont en arc sur la Seine à La Roche Guyon (1932-1934), record mondial des ponts en arc en béton armé à tablier suspendu avec une portée de 160 m et une flèche de 21,50m , détruit par fait de guerre en 1940, et non reconstruit).
L’entreprise Boussiron construit également le viaduc ferroviaire de la Méditerranée sur le Rhône, record mondial des ponts rail en béton armé à double voie suspendue (1950), le hangar double de l’aéroport de Marignane, record mondial de portée pour les couvertures à voile mince (1949-1953), le viaduc de La Voulte-sur-Rhône, le plus long pont du monde sous voie ferrée normale en béton précontraint (1953-1955) et les pylônes du pont de Tancarville, record mondial de hauteur des piles de pont suspendu en béton armé (1955-1959).
Cette liste d’exploits, qui témoigne bien de l’exigence d’innovation de l’entreprise, culmine avec la réalisation du CNIT (Centre national de l’industrie et des techniques), dans le quartier de La Défense près de Paris, qui détient toujours les records mondiaux de portée et de la plus grande surface de plancher supportée par point d’appui (1952-1958).
Simon Boussiron prend sa retraite en 1936, et son entreprise est reprise par son gendre Jacques Fougerolle, époux de sa fille Jeanne. Entre 1946 et 1952, l’entreprie Boussiron développe le procédé de précontrainte B.B.R-B qui est une combinaison du procédé primitif de Boussiron avec mise en tension des fils par torsion et du procédé suisse BBR-V. Ce procédé utilisait des fils parallèles de 7 mm de diamètre pour former des câbles de type 18 f 7 ou 30 f 7, avec blocage par boutonnage des fils sur les têtes d’ancrage métalliques filetées et interposition de cales métalliques entre les plaques et les têtes d’ancrage pour compenser les allongements. A la suite du décès brutal de Jacques Fougerolle en 1965, l’entreprise est cédée en 1969 à la CFE, puis est absorbée en 1974 par Bouygues.
Simon Boussiron décède le 25 décembre 1958 à Paris et est inhumé à L’Etang-la-Ville (78).
Pour en savoir plus :
- INPI, Brevet « Disposition d’articulation des arcs en béton armé ou en maconnerie », déposé par Simon Boussiron le 10 octobre 1906.
- INPI, Brevet « Perfectionnements au mode de construction des couvertures en béton armé » déposé par Simon Boussiron le 05 octobre 1921.
- INPI, Brevet « Perfectionnement apporté à la construction des ponts paraboliques en béton armé » déposé par Simon Boussiron le 28 septembre 1928.
- Sur Archiwebture : Fiche descriptive (Fonds Société des entreprises Boussiron. 169 Ifa).
- Sur Wikipédia : Simon Boussiron.
- Sur Structurae : Simon Boussiron.
- Sur ACPresse : Le pont de Clairac, un ouvrage d’art précurseur.
- Travaux Publics de France – Un siècle d’entrepreneurs et d’entreprises (1883-1992), de D. Barjot aux Presses des Ponts et Chaussées (1993).
- Sur le site la Fondation Arts et Métiers « gadz’arts » : Simon Boussiron – Aix 1888.
- L’Art de l’ingénieur, Paris, Le Moniteur, 1997, 600 p. (ISBN 978-2-85850-911-9, LCCN 97206496), « Boussiron (Simon) ».
- Bernard Marrey, Nicolas Esquillan, un ingénieur d’entreprise, Paris, Picard éditeur, 1992, 176 p. (ISBN 978-2-7084-0436-6, LCCN 94220521).